Un péché mortel contre le dieu-père
Le patriarcat est un système social basé sur la reconnaissance de paternité : le père est à la source de la filiation et c’est par lui que passe la transmission du nom ainsi que de la majeure partie de l’héritage. Le mariage sert a sécuriser cette paternité : un homme épouse une femme vierge qui lui donnera avec certitude des héritiers légitimes (de son sang) a qui il transmettra ses biens. Toute sexualité hors mariage est un fléau car pouvant engendrer des enfants non reconnus par leur géniteur, des enfants dits « illégitimes », ou « bâtards », que la société ne peut pas prendre en charge.
Camps de concentration pour mères célibataires
Une mère pourra difficilement élever ses enfants seule pour des raisons économique et « morales ». La présence d’un bâtard demeure honteuse, car symbolisant l’absence de virginité avant le mariage. Pour préserver l’honneur familial, ces enfants sont souvent accouchés en toute discrétion, puis tués, abandonnés, ou confiés à des institutions spécialisées (orphelinat, couvent). Leur chances de survie sont généralement mince.
Irlande : 800 cadavres de bébés découverts dans la fosse septique d’un ancien couvent
Une macabre découverte dans la fosse sceptique d’un ancien couvent
Le couvent «The Home» à Tuam en 1950. Image: Société d’histoire de Tuam
Le 03 juin 2014 sur dhnet.be
800 bâtards pourrissent dans les matières fécales
Environ 800 cadavres de bébés « illégitimes » ont été découverts dans la fosse septique d’un ancien couvent irlandais à Tuam (ouest), plus de 50 ans après la fermeture de l’établissement dirigé par les sœurs du Bon Secours de 1925 à 1961.
En secret pour l’honneur familial
A l’époque, des jeunes filles tombées enceintes hors mariage venaient y accoucher, laissant leurs bébés entre les mains des nonnes, rapporte The Washington Post mardi. Dans l’Irlande ultra catholique de l’époque, lorsqu’une jeune fille tombait enceinte en dehors des liens sacrés du mariage, elle était envoyée dans un couvent pour donner naissance à son enfant dans la plus grande discrétion, avant de le confier aux sœurs.
Maltraitance, malnutrition et négligence sanitaire
Les recherches de l’historienne montrent que la plus part de ces enfants sont morts de malnutrition, maltraitrance, pneumonie, handicap ou naissance prématurée. Des documents historiques ont démontré que les bébés étaient gravement négligés : ils étaient à peine nourris et ne recevaient que les soins médicaux les plus élémentaires. Ceux qui contractaient la rougeole, la tuberculose ou la pneumonie étaient abandonnés à leur propre sort. Le couvent de Bon Secours s’est livré à ces exactions pendant 35 ans en toute impunité. En 1944, une inspection du gouvernement avait pointé une évidente malnutrition sur les 271 enfants vivant à Tuam.
Vendus et exploités
Seuls ceux qui restaient en bonne santé avaient une chance d’être adoptés ou vendus à des couples riches sans enfant. Les enfants survivants du couvent été placés vers l’âge de sept ans dans des églises ou des réseaux industriels, où ils travaillaient gratuitement et souffraient d’abus. Cette mortalité infantile est aussi l’un des reflets de l’Irlande de la première moitié du XXe siècle, qui détenait le record européen de mortalité infantile, aggravé par un fort taux de tuberculose.
Sans cercueil ni pierre tombale
C’est en réalisant des recherches sur les archives de cet ancien couvent, aujourd’hui reconverti en lotissement, que l’historienne Catherine Corlessa découvert 796 nouveau-nés et bambins enterrés, sans cercueil ni pierre tombale. Elle a établi qu’en 36 ans, près de 800 enfants illégitimes seraient morts dans un foyer appelé The Home et tenu par des religieuses à Tuam (Irlande). La chercheuse s’est appuyée sur les archives de l’état civil : actes de naissance et de décès.
A l’origine, des locaux avaient découvert les premières traces de ce cimetière et placé une statue de la Vierge, dans une petite grotte, à la mémoire des malheureux. «Quelqu’un m’avait mentionné l’existence d’un cimetière pour nouveau-nés, mais ce que j’ai découvert était bien plus que cela», a déclaré l’historienne Catherine Corless, à l’origine de cette découverte.
Un seul enfant enterré au cimetière
L’historienne a rapidement constaté un écart criant entre le nombre de décès consignés dans les registres et la présence d’un seul enfant du foyer dans le cimetière de la ville. Or, dans une ancienne fosse septique découverte par des enfants en 1975 sur le site d couvent, de nombreux ossements épars avaient été retrouvés. Catherine Corless en a déduit qu’il s’agissait des restes des petites victimes.
« Il y a juste un enfant qui a été enterré dans le cimetière de Tuam. C’est ainsi que j’en ai déduit qu’il y avait au moins 796 bébés dans la fosse », a-t-elle expliqué au Daily Mail, considérant qu’aucun bébé n’avait été confié à des familles d’accueil.
Pas d’acte de décès
Les documents indiquent notamment qu’une célibataire nommée Bridget Dolan de Clonfert a donné la vie, en 1946 et 1950, à deux garçons qui ont été placé dans cette institution. Un certificat de décès a été établi pour le premier, mort à 16 mois. En revanche, pour le second également mort très jeune, il n’existe aucun document. Récemment, un membre de cette famille a déposé plainte dans l’espoir de comprendre ce qu’il s’est passé à l’époque. La police devrait entreprendre des fouilles pour faire avancer l’enquête. Pour rendre hommage à ces enfants, une levée de fond a également été lancée afin de construire un mémorial mentionnant le nom de chacun.
L’Eglise bâtit un mémorial pour se faire pardonner
Les femmes qui ont accouché dans l’établissement de Tuam – appelé The Home – ont l’intention de déclarer la disparition de leur enfant afin qu’une enquête soit ouverte, indique le journal britannique The Daily Mail. L’Eglise catholique irlandaise a annoncé qu’elle ferait construire un monument commémoratif portant le nom des 800 enfants sur le site de l’ancien couvent, a précisé The Independant.
Une histoire vraie au grand écran
La tragédie du couvent de Tuam rappelle l’histoire vraie – et portée à l’écran – de Philomena Lee, cette adolescente qui a accouché dans un couvent irlandais au début des années 1950 avant que les religieuses lui retirent l’enfant contre son gré et le fassent adopter par une famille américaine.
CINEMA : Philomena à la recherche de son fils perdu, kidnappé par l’Eglise car conçu hors mariage
Les blanchisseries de Madeleine
Cette découverte rappelle un autre scandale impliquant également des mères célibataires. Entre 1922 et 1996, plus de 10’000 jeunes filles et femmes avaient travaillé gratuitement dans des blanchisseries exploitées commercialement par des religieuses catholiques en Irlande. Les pensionnaires, surnommées les «Magdalene Sisters», étaient des filles tombées enceintes hors mariage ou qui avaient un comportement jugé immoral dans ce pays à forte tradition catholique.
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L’abandon d’enfants illégitime, une institution patriarcale
C’est en créant le statut d’enfant légitime, que les sociétés patriarcales ont induites le statut d’enfant illégitime, avec les pénalités qui en découlent. Les solutions qu’elles proposent pour résoudre ce problème ne fonctionnent pas : Il est impossible de canaliser l’ensemble des rapports sexuels d’une société dans le cadre légal du mariage. La sexualité s’exprime toujours, y compris par des voies officieuse (viol, prostitution de masse, légale ou pas).
Rappelons que 3 millions d’enfants illégitimes ont été abandonnés en France entre la seconde moitié du 18ème siècle et la fin du 19ème (selon le démographe Jean Pierre Bardet), ou que 23 enfants illégitimes sont abandonnés chaque jours au Maroc (selon Nadia Cherkaoui du cabinet AMERS).