Arawelo ou la reine diabolique (Somalie) : la diabolisation du matriarcat en terre islamisée

C’est le titre d’une petite bande dessinée très bien travaillée et signée Osman Houssein Barkhadleh. Dans la légende, Arawelo est « une mythique reine  dictatrice qui avait réduit tous les hommes à l’impuissance et instauré une société matriarcale ».

Editée en 2001 sur les presses de l’imprimerie Rift Valley, l’œuvre du jeune dessinateur djiboutien puise sa sève dans la légende tout comme sa précédente BD consacrée aux « Aventures d’Igal Chidad« , ce personnage mythique dont le principal mérite aura été d’être un poète de talent doublé du plus grand poltron que la terre ait porté.

Après Igal Chidad et ses mésaventures trop souvent comiques, place à « Arawelo, la reine diabolique. » C’est au génie de ce personnage hors pair que l’on doit, dit-on, ce que l’on appelle, à tort ou à raison, le « caprice » chez les femmes.

Arawelo, c’était tout et son contraire. Avec elle, même le langage perdait sa vocation première par substitution. Pour parvenir à cela, elle utilisait tout un répertoire de ruses et de stratagèmes qu’elle produit elle-même sur la base des années de vie passées à côtoyer les hommes et à lutter contre une prétendue supériorité du mâle par rapport à la femelle.

Dans une société patriarcale où les hommes, en plus d’un profond mépris à l’égard des femmes, avaient une haute estime d’eux-mêmes, la stratégie d’Arawelo, si l’on peut appeler ainsi son œuvre « diabolique », n’avait de but que d’inverser la balance.

Autrement dit, elle se proposait de rendre à la gent féminine et sa fierté et sa dignité perdues, piétinées par des hommes aussi injustes qu’imbus de leur hégémonie.

Ainsi parlait Arawelo, la rebelle, en s’adressant aux femmes : « Apprenez à dire à vos maris et à vos fiancés quand bien même vous adhérez à leurs idées, à leurs opinions, à leurs projets, à leurs décisions…etc. Qu’ils ne sachent guère ni ce que vous voulez dire, ni ce que vous voulez faire ! Oui, qu’ils ne sachent point ni ce à quoi vous pensez, ni ce à quoi vous rêvez ! Faites en sorte que vous devenez à leurs yeux un mystère ; un vrai et éternel mystère. Et alors seulement vous pourrez prétendre à la victoire, ou tout au moins d’avoir le dessus dans le duel qui nous oppose aux hommes depuis la nuit des temps. »

Arawelo aurait-elle été entendue ? Ses prêches seraient-ils restés sans effet sur les femmes aussi bien dans le passé que dans le présent ? La légende ne permet pas de trancher. C’est dire ses propres limites. C’est dire également combien le mythe de « la reine diabolique » s’est prêté au cours des siècles et continue de se prêter encore aujourd’hui à toutes les interprétations possibles, y compris les plus perverses, les plus incroyables et les plus improbables. Résultat : une quantité incalculable de scénarios ont été conçus à partir d’un même évènement, et les versions varient d’un conteur à un autre.

Autant dire que ce que l’on appelle la mémoire collective n’en est pas parfois une. L’histoire d’Arawelo en est ici le parfait exemple.

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Arawelo était une reine qui a régné sur ce qui est aujourd’hui la Somalie. Son trône a été transmis à sa nièce, Araxsan. Celle-ci a été la première-née de trois filles, et l’héritière naturelle de la dynastie. Comme beaucoup de dirigeants féminins, Arawelo s’est battue pour l’autonomisation des femmes. Elle pensait que la société devait être fondée sur le matriarcat. Arawelo était réputée pour castrer les détenus de sexe masculin. Elle fut l’un des premiers dirigeants féminins dans le monde, et était aussi une figure de l’autonomisation des femmes. La reine était bien connue dans toute l’Afrique. La reine de Saba lui envoya des cadeaux sous la forme de pièces d’or pour la féliciter.

La reine était bien connue pour défier les rôles des genres. Lors des sécheresses de la région de Buraan (avant qu’elle soit reine), elle et une équipe de femmes, ont sauvé la ville de la famine et de l’exode en incitant à la chasse et à la corvée d’eau. L’époux d’Arawelo s’est opposé au rôle qu’elle s’est attribuée en tant que pilier de la famille et de toute la société. Il pensait que les femmes devaient se limiter à des tâches domestiques, concernant seulement la maison, et laisser tout le reste aux hommes. En réponse, Arawelo a exigé que toutes les femmes à travers le pays abandonnent leur rôle de femme dans la société, puis elle a commencé à traîner les hommes par leurs testicules. La grève a réussi à forcer les hommes dans le rôle de l’éducation des enfants et à créer un renversement des rôles dans la société.

Arawelo voyait dans les femmes des gardiennes naturelles de la paix. Une inversion des rôles était nécessaire à ses yeux. En grandissant, elle a remarqué que les hommes étaient plus souvent les instigateurs, les participants et les meneurs de la guerre. Elle ne s’est pas seulement battu pour la libération des femmes dans la société patriarcale, mais aussi pour la domination de la femme, car elle les voyait comme de meilleures dirigeantes, les plus efficaces.

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