La technique agricole mixte de cultures complémentaires, dite des trois sœurs, représente les trois principales cultures pratiquées traditionnellement par diverses ethnies amérindiennes d’Amérique du Nord et d’Amérique centrale : la courge, le maïs et le haricot grimpant (habituellement le haricot tépari ou le haricot commun). La culture conjointe de ces trois plantes compagnes présente plusieurs avantages qui profitent à la culture de chacune :
- une plante à croissance rapide et suffisamment solide pour servir de tuteur (ici, le maïs)
- une légumineuse grimpante (azote de l’air amené au sol)
- une cucurbitacée (les feuilles font de l’ombre)
De plus, le maïs et le haricot forment une paire alimentaire de base qui fournit tous les apports nécessaires en acides aminés essentiels. Cette technique d’agriculture a une place importante dans plusieurs mythologies amérindiennes.
Il s’agit pour les Iroquois d’une trinité divine qui a jailli de la tombe de la Terre mère, morte d’avoir enfanté les jumeaux Bien et Mal. On n’a pas encore retrouvé chez les autres peuples iroquois (Hurons, Eries, Pétuns, Wenros, Andastes) de légende similaire.
Les Anasazi sont connus pour les avoir adapté en environnement aride. Les Hopi et autres tribus du sud-ouest incluent une quatrième sœur connue sous le nom « Plante à abeilles, des montagnes rocheuses » (Cleome serrulata), plus connue localement sous les termes de Rocky Mountain Beeweed, Rocky Mountain Beeplant, Bee Spiderflower, Stinking clover, Waa’ en Navajo ou encore Navajo spinach, attirant les abeilles pour aider la pollinisation des haricots et des potirons.
Les semences de Gemu, la déesse-mère des Moso
En Chine, à la frontière entre le Yunnan et du Sichuan, sur les contreforts de l’Himalaya, l’ethnie matriarcale Moso du groupe Naxi, cultive elle aussi traditionnellement les trois-sœurs, selon une technique identique à celle employée dans les Amériques.
Sauver l’agriculture biologique par le matriarcat : les femmes maîtresses des semences – Kokopelli
« Le péril écologique mondial est la conséquence de l’appropriation par le patriarcat des deux sources de vie, fertilité et fécondité. » P 15. Françoise d’Eaubonne, Les femmes avant le patriarcat.
Présentation du mouvement Femmes Semencières
Le Mouvement est né en 2011 à la demande de Pierre Rabhi. Son objectif est de relier partout sur la Planète des réseaux de gardiennes et de gardiens de Semences existants, de conserver et transmettre les savoir faire sur la reproduction et la conservation des semences vivantes et non modifiées!
Femmes paysannes
La souveraineté alimentaire au quotidien
Sur Nyéléni 2007 – Forum pour la Souverainté Alimentaire. 23 – 27 Février 2007. Sélingué. Mali
Les femmes jouent un rôle très important dans l’agriculture. En Inde, au Mexique ou au Mali, elles sont les gardiennes de la diversité agricole et des savoirs traditionnels et paysans. A Nyéléni, ces paysannes venues du monde entier ont pu se rencontrer, échanger et réfléchir ensemble à des moyens concrets pour s’affranchir de la discrimination qu’elles subissent. En effet, bien que les systèmes paysans -agricoles et sociaux- reposent en grande partie sur leurs savoirs qu’elles perpétuent, l’accès aux ressources leur est difficile.
A Nyéléni, les femmes paysannes ont pu témoigner de leur lutte pour l’accès aux ressources qui leurs permettent de perpétuer et de conserver le patrimoine alimentaire de la planète. Petit agriculteurs, pêcheurs, bergers, populations indigènes et travailleurs agricoles mènent un combat commun pour accéder à la terre, l’eau, les semences, la forêt et les animaux. Dans ce contexte difficile, les paysannes sont souvent victime d’une double discrimination.
Les femmes dans les sociétés paysannes, assurent à la fois l’éducation des enfants, les tâches journalières, et les travaux agricoles. Ainsi, bien qu’elles maintiennent la cohésion sociale au sein de ces communautés, elles ne bénéficient pas cependant des mêmes droits.
Image : Matriarcat Mandingue (Sénégal, Mali, Guinée Bissau) : du totémisme à l’islam, à la fondation de royaumes matrilinéaires
A Nyéléni, les femmes paysannes ont pris la parole en organisant la veille du Forum une « Journée des Femmes ». Le but de cette manifestation était de montrer le rôle des femmes, et dans l’organisation du Forum, et dans la lutte pour la souveraineté alimentaire. Lors de cette journée, elles ont fait revivre le mythe de Nyéléni, cette paysanne malienne, qui s’est battue pour la reconnaissance de sont travail, et qui est devenue le symbole de la lutte pour l’alimentation : une mère nourricière.
Les femmes sont les conservatrices de la diversité agricoles, des variétés traditionnelles et des semences de ferme. Nous avons fait la rencontre de paysannes indiennes qui cultivent parfois plus d’une douzaine de variété sur une acre de terre. En Afrique aussi, ou en Amérique latine, les paysannes continuent de domestiquer les espèces sauvages, collectées dans la brousse ou dans la jungle, pour les améliorer et en faire de nouvelles variétés alimentaires. C’est pourquoi, à Nyéléni, l’accent est mis à juste titre sur la valorisation et la promotion du rôle des paysannes dans la souveraineté alimentaire.
A Nyéléni, les femmes (paysannes, travailleuses, petites agricultrices…) se battent pour la reconnaissance, l’égalité des droits, et la participation à la prise de décision. La reconnaissance de leur rôle historique est indispensable dans la souveraineté alimentaire à travers la conservation des semences paysannes, et la perpétuation des savoirs traditionnels. Elles sont les garantes de l’héritage agro-culturel de l’humanité et revendiquent l’égalité des droits à l’accès aux ressources, à la terre, à l’eau, aux financements et aux moyens de productions ; et enfin la participation aux consultations, et aux processus démocratiques et citoyens de prise de décision.
Déméter et les mystères d’Eleusis
Le culte secret de la déesse-mère de l’agriculture
La révolution du néolithique
C’est sous l’égide de la déesse Mère que s’opère la révolution du néolithique, avec l’apparition de l’agriculture, puis de l’élevage. Les premières traces d’agriculture se trouvent situées, vers 9500 ans avant J.- C., dans une bande alluviale qui va de la vallée du Jourdain à l’Euphrate. Une région où les statuettes féminines sont connues depuis le paléolithique supérieur (moins 30 000 à moins 12 000).
La Mère de la Terre
Dans la mythologie grecque, Déméter (en grec ancien Δημήτηρ / Dêmếtêr qui dérive de Γῆ Μήτηρ / Gễ Mếtêr, « la Terre-Mère » ou de Δημομήτηρ / Dêmomếtêr, « la Mère de la Terre », de δῆμος / dễmos, « la terre, le pays ») est la déesse de l’agriculture et des moissons. Les Romains l’associèrent à Cérès. Triptolème (en grec ancien Τριπτόλεμος / Triptólemos) est le héros grâce à qui l’humanité apprend l’agriculture, et donc la civilisation. Il répand le culte de Déméter et crée les mystères d’Éleusis.
Mère de la faune terrestre et marine
Déméter, dont le nom veut dire la Mère divine, la mère universelle, était la plus ancienne des divinités grecques, puisque les Pélasges d’Arcadie l’honoraient déjà sous la figure d’une déesse à tête de cheval, tenant une colombe dans une main et un dauphin dans l’autre, signifiant par là qu’elle avait enfanté à la fois la faune terrestre, les oiseaux et les poissons. Elle correspondait donc à ce que nous nommons la Nature.
Pour se préserver des persécutions
La crise sociale qui aboutit à l’établissement du patriarcat a revêtu en Grèce une forme religieuse. Les hommes restés fidèles à l’ordre matriarcal refusant de reconnaître et d’honorer les dieux nouveaux, on été selon Hésiode, exterminés par Zeus pour faire cesser le culte des antiques déesses (Gaïa, Rhea, Demeter, les Erynnies, les Keres, etc…). Les persécutions ne parvinrent pas à le supprimer, mais il dut s’entourer d’ombre et de mystère.
Un culte agraire étendu à tout un empire
Les mystères d’Éleusis faisaient partie d’un culte à mystères, de nature ésotérique, effectué dans le temple de Déméter à Éleusis (à 20 km au sud-ouest d’Athènes). Ils sont consacrés aux déesses Déméter (terre) et sa fille Perséphone (enfer). Ce culte agraire rendu à la déesse grecque de l’agriculture, s’étendra à toute la Grèce et, à l’époque romaine, à tout l’Empire romain. Les déesses mère et fille d’Éleusis ont probablement des racines préhelléniques, ceci étant suggéré par la relation entre leur légende et la culture des céréales, introduite en Grèce longtemps avant l’arrivée des Grecs. Selon le mythe, Déméter dévoila aux hommes ses mystères et la maîtrise de l’agriculture.
Son culte défendu par les armes
Le poète Eschyle (Ve siècle avant JC), citoyen d’Eleusis et initié aux Mystères de Déméter, fut accusé de les avoir révélé. Il connaissait les souvenirs de l’époque matriarcale que les prêtresses conservaient et expliquaient aux initiés. L’explorateur Pausanias (I, 38) rapporte que, dans les temps préhistoriques, les habitants d’Eleusis durent défendre par les armes le culte de Déméter, que les Athéniens voulaient abolir.
« Sitôt découverts les secrets de la culture multipliée par la charrue et l’irrigation, les Sumériens, les Mésopotamiens, les Babyloniens ont arraché des flans de la terre des récoltes bien plus vastes que les précédentes, et se sont enivrés de leur victoire sur les déesses de la fertilité au point d’en abandonner peu à peu les directives que Triptolème avait reçues, jadis ; entre autres, cette sage coutume de laisser reposer une partie des champs tandis qu’on en exploite l’autre. La terre s’est épuisée ; d’immense territoires, naguère débordant de céréales, sont devenus incultes et arides. L’avidité dite « humaine », en réalité masculine et patriarcale et se confondant avec l’essor de la productivité d’où sort le monde moderne, a condamné à mort la poule aux œufs d’or […] Sans cet impérialisme et cette avidité de produire et de consommer qui se double promptement d’un bon démographique, le monde serait resté fixé au stade de la prudence et n’aurait pas bougé. En histoire de la culture, le Féminin conserve, le Masculin accroît […] Le progrès dans l’élévation du niveau de vie et du nombre de producteurs-consommateurs entraîné par l’apparition du patriarcat se basait sur trois valeurs culturelles inconnues des premières sociétés féminines : l’appropriation, la compétitivité et l’expansionnisme. » – Françoise d’Eaubonne, Les femmes avant le patriarcat. P 198-199.