Les Vierges noires sont des effigies féminines qui appartiennent à l’iconographie du Moyen Âge européen. Elles tirent leur nom de leur couleur sombre, souvent limitée au visage et aux mains. La plupart d’entre elles sont des sculptures produites entre le xie et le xve siècle. On trouve parmi elles de nombreuses Vierges à l’enfant. La majorité des 450 à 500 recensées se rencontrent dans le bassin méditerranéen occidental, domaine de l’art roman, avec une concentration importante dans le sud de la France où on en compte 180. Bien que des musées en conservent, la plupart des Vierges noires sont placées dans des églises et certaines suscitent des pèlerinages importants.
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Des attributs non chrétiens
Les peuples d’Europe ont accordé aux Vierges noires une importance qui dépasse largement le simple respect dû à la mère du Christ. La plupart de ces Vierges noires sont liées à des rites de fertilité, de fécondité ou de sexualité. Ce ne sont pas là les attributs ordinaires de la Vierge chrétienne. A Montserrat, l’hommage à la Madone donne lieu à une fête singulièrement païenne, puisque les fidèles se livrent à une danse circulaire qui rappelle volontiers les antiques danses orgiaques. La célébration de l’Assomption de Marie le 15 août est également le jour d’une des principales célébrations de la déesse Artémis.
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La lune protectrice des marins
D’autres Vierges noires sont également liées aux astres, à la Lune ou à Vénus. Comme la Lune influence les marées, la Vierge Noire était donc liée à la mer et elle protégeait les marins, qui l’appelaient Stella Maris (Étoile de la Mer). Plus tard, elle sera assimilée à l’étoile Polaire ou à Vénus.
La porteuse de lumière
Comme la Lune, Vénus a le double aspect d’étoile du soir et d’étoile du matin. Étoile du matin, elle était considérée comme néfaste. Cette tradition se retrouve dans le judéo-christianisme : l’étoile du matin est souvent associée à Lucifer (du latin : lux fero, «Je porte la lumière »).
Le secret des Vierges Noires
Si elles représentent parfois Marie, la mère du Christ, ces statues sont chargées de tout autre chose. Elles prennent un sens qui dépasse la symbolique chrétienne ordinaire. Mais de quel passé nous arrivent-elles ? Et quel message alors nous apportent-elles ?
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« On appelait « vierges » les anciennes prêtresses de la lune. À cette époque, « vierge » décrivait une femme qui n’était pas mariée ou qui n’appartenait à aucun homme – elle était une « femme qui était entière ». Le terme provient d’une racine latine qui signifie « force » ou encore « habileté » et fut plus tard associé aux hommes : « virle ».
Ishtar, Diana, Astarte, Isis, toutes des déesses qui furent appelées vierges, bien que cela ne faisait pas référence à leur chasteté sexuelle mais bien à leur indépendance sexuelle. Toutes les grandes cultures parlent d’un héros, mythique ou historique né d’une mère vierge : Marduk, Gilgamesh, Bouddha, Osiris, Dionysos, Genghis Khan, Jésus, tous étaient le fils de la Grande Déesse, de la Déesse Originelle, et leurs pouvoirs mondains lui étaient dus.
Lorsque les Hébreux l’utilisaient dans la langue araméenne, ils sous-entendaient « jeune fille » et le terme était dénudé de connotations liées à la chasteté sexuelle. Lorsque les chrétiens traduisirent la bible hébraïque, ils ne pouvaient concevoir une Vierge Marie comme une femme dont la sexualité était libre et indépendante et, il va sans dire, déformèrent le sens du terme vierge afin qu’il sous-entende une sexualité pure, chaste, intouchée. » – Monica Sjöö, The Great Cosmic Mother: Rediscovering the Religion of the Earth
Gardiennes des sources sacrées
Toutes les Vierges noires sont à proximité de l’eau. Les Vierges Noires ont pris la succession des anciennes déesses sous une forme christianisée.
« Ne sont-elles pas si souvent à proximité immédiate de sources, de puits, d’arbres ou de pierres qui avaient chez nos ancêtres pré-chrétiens une signification sacrée bien connue ? Mais avant d’être représentée, la Mère de la manifestation fut adorée sous l’apparence d’une Pierre Noire tombée du ciel, comme à Ephèse pour Artémis. Le « bétyle », pierre noire d’origine météorique, figure Cybèle la Noire, ou la « Grande Déesse » chthonienne grecque. Et le pèlerin musulman baise la Pierre Noire de la Kaaba à La Mecque. Toutes les Vierges Noires, comme encore Kali la Noire (Inde), Isis, Astarté, Sara (Gitans), Annis appelée en Grande Bretagne Black Annis, Innani (Summer), … convient les êtres à percer toutes les couches de leur matière, à aller aux Tréfonds, là où Elle se trouve, pour leur révéler Sa lumière. »
La compagne du Serpent Tellurique
Henri Vincenot (1912 – 1985), est un écrivain, peintre et sculpteur français. Il voit la vouivre comme un immense serpent souterrain qui correspond au courant tellurique terrestre dans son ouvrage Les étoiles de Compostelle. Selon lui, les Vierges Noires ont été vénérées comme des symboles astronomiques de ces courants d’énergie souterrains. Les lieux où l’on adorait les Vierges noires n’étaient pas choisis au hasard. Aux yeux des Celtes, la Terre était un organisme vivant, la Grande Mère, d’où procédait toute vie. Comme un corps, la Terre était nourrie par tout un réseau d’artères cachées sous sa surface. Le réseau terrestre était parcouru par une énergie impalpable. Cette énergie et les courants qui la portaient avaient un nom : c’était la Wouivre, le « serpent ».
Le pèlerinage de la Wouivre
Les points de rencontre de plusieurs de ces artères devenaient des lieux sacrés, reconnus comme « centres d’énergie », aux propriétés bienfaisantes (santé, fertilité, guérison…). Tous ces points de rencontre étaient signalés, quelle que soit leur importance, par un menhir ou une statue sacrée. Les Vierges Noires marqueront les plus importants carrefours de la Wouivre. Dans certains lieux de culte chrétiens, il est encore possible de voir l’antique menhir qui marquait le pèlerinage païen. Souvent, l’autel même sur lequel se déroule la messe est fait de l’ancienne pierre sacrée.
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Vierge Marie et Déesse Mère : la religion des templiers
Alma mater est une expression d’origine latine, traduisible par « mère nourricière ». Le terme était employé dans la Rome antique pour désigner la déesse mère. Au Moyen Âge, l’expression était aussi employée par les chrétiens pour désigner la Vierge Marie, mère de Jésus de Nazareth. « Alma Mater Studiorum » est la devise de l’Université de Bologne fondée en 1088 et plus ancienne université du monde occidental. L’usage de cette expression s’est ensuite progressivement propagé dans les autres universités européennes. Alma mater est également une bulle pontificale fulminée par le pape Clément V le 4 avril 1310 dans le cadre du procès de l’ordre du Temple.
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Des survivantes de la christianisation
Dans les années 1950, avec l’avancée des études en matière de religions comparées, des rapprochements ont été faits avec les déesses des anciens cultes polythéistes d’Europe occidentale que la romanisation, suivie de la christianisation, avaient fait disparaître, en particulier les déesses-mères, confortés par la présence de sanctuaires dédiés à la mère de Dieu sur les lieux d’anciens cultes païens (Cybèle, Diane etc..). Benko et Chiavola Birnbaum ont remarqué la ressemblance entre la Vierge à l’enfant et les représentations d’Isis portant Horus datant de l’Égypte ptolémaïque. Pour Stephen Benko (rejoint par Alexandre Hislop), « la Vierge noire est l’ancienne déesse-terre convertie au christianisme. Benko commence par montrer que de nombreuses représentations de déesses sont noires, parmi lesquelles Artemis d’Éphèse, Isis, Cérès et d’autres. Cérès, déesse romaine de la fertilité agricole, est particulièrement importante. Son équivalent grec est Déméter, Déesse-Terre. Le sol le plus fertile est noir, et plus il est noir, plus il convient pour l’agriculture. »
Des reines célestes qui embarrassent l’Eglise
Elles portent presque toujours une couronne : considérées comme des « Reines des cieux ». Elles sont associées à des représentations de la Lune ou des étoiles. Il s’agit d’une pratique qui nous ramène à l’ère pré-chrétienne et qui perpétue les cultes païens des divinités féminines. Ces « Maîtresses du Monde » causent beaucoup de souci à l’Église catholique, qui les met « hors circuit » dès qu’elle le peut sans trop choquer les populations locales, toujours plus attachées aux Vierges qu’à la fréquentation des messes. Depuis le XIXe siècle, beaucoup de ces Vierges noires ont été remplacées par des représentations plus conformes au modèle marial. Quand elles n’ont pas été, tout simplement, repeintes… en blanc !
Marie Madeleine, la « vierge » païenne
Trop parfaite pour être vraie, cette nouvelle Marie n’avait rien d’attrayant pour les fidèles emprunts de paganisme. D’où la mise en place d’une seconde Marie, qui prendrait en charge les éléments obscurs et « trop féminins » des anciens cultes païens. Ce sera Marie-Madeleine, qui représentera tout ce que la Mère de Dieu n’était pas, et qui prendra souvent le visage des fameuses Madones noires. Les Vierges noires chrétiennes seront ainsi théoriquement vouées à Marie-Madeleine, fornicatrice mais « vierge » elle aussi car non-mariée, la supposée et contestée compagne de Jésus, plutôt qu’à sa mère.
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Avant la Création du Dieu-Père
Dans le texte de la messe de l’Immaculée Conception, on trouve les paroles suivantes : « Le Seigneur me posséda au début de toutes choses. J’existais avant qu’il ne donne la vie aux créatures. J’existais de toute éternité, avant même que la Terre ne soit créée. »
Tout obéit à Marie, même Dieu
Plusieurs écrivains chrétiens du Moyen Age en arriveront à admettre que c’est la Vierge, et non Dieu, qui a créé le monde ! L’un d’entre eux écrira : « Tout obéit à Marie, même Dieu. » C’est ainsi que, insensiblement, le christianisme du Moyen Age se teintera des couleurs d’une religion matriarcale, fondée sur le principe féminin symbolisé par Marie. Dans le même temps, les qualités « féminines » de Jésus étaient accentuées : douceur, bienveillance, et même passivité. La Vierge était devenue la médiatrice entre les hommes et leur dieu, en quelque sorte une déesse protectrice de l’Europe occidentale.
Les cathédrales, temples païens de la Déesse
Les grandes cathédrales étaient les temples de cette déesse. Entre 1170 et 1270, pas moins de 84 cathédrales dédiées à Notre-Dame et cinq cents églises seront édifiées à sa gloire. La plus grande partie de ces monuments seront bâtis sur des sites déjà consacrés par la présence d’une statue de Madone, le plus souvent noire et généralement pré-chrétienne.
La déesse druidique des Carnutes
Chartres est située au centre de la Beauce, recouverte autrefois par une forêt immense, la forêt des Carnutes, qui, selon Jules César, abritait le plus grand sanctuaire de toute la Gaule, sanctuaire où les Druides venaient célébrer, une fois l’an, de très secrètes liturgies. Ce qui est sûr, en tout cas, c’est qu’il existe une filiation évidente entre le culte druidique de la Déesse-Mère et le culte de la Vierge Marie, culte lié lui-même aux représentations dites de la » Vierge Noire « .
La Déesse des Commencements
La cathédrale de Chartres est un sanctuaire dédié à la Vierge bien avant l’introduction du christianisme en Gaule. Cette « Virgo Paritura » que les Druides ont vénérée à l’emplacement même de la crypte de la cathédrale actuelle, dans une grotte, est appelée » Notre Dame de Sous-Terre « , l’image de la Mère universelle, la Déesse des Commencements, celle » sur le point d’enfanter » le monde, vers laquelle se dresse l’humanité entière, celle enfin que les chrétiens ont fini par identifier à l’Immaculée conception.
Les deux vierges de Chartres
Selon Fulcanelli, « La cathédrale de Chartres est la mieux partagée sous ce rapport ; elle en possède deux, l’une désignée sous le vocable expressif de Notre-Dame-sous-Terre, dans la crypte, est assise sur un trône dont le socle porte l’inscription déjà relevée : Virgini parituræ ; l’autre, extérieure, appelée Notre-Dame-du-Pilier, occupe le centre d’une niche remplie d’ex voto sous forme de cœurs embrasés. Cette dernière, nous dit Witkowski, est l’objet de la dévotion d’un grand nombre de pèlerins. Primitivement, ajoute cet auteur, la colonne de pierre qui lui sert de support était « cavée » des coups de ses fougueux adorateurs, comme le pied de saint Pierre, à Rome, ou le genou d’Hercule que les païens adoraient en Sicile ; mais, pour la préserver des baisers trop ardents, elle fut entourée d’une boiserie en 1831. Avec sa Vierge souterraine, Chartres passe pour être le plus ancien de tous les pèlerinages. Ce n’était d’abord qu’une antique statuette d’Isis sculptée avant Jésus-Christ, ainsi que le racontent d’anciennes chroniques locales. Toutefois, notre image actuelle ne date que de l’extrême fin du xviiie siècle, celle de la déesse Isis ayant été détruite, à une époque inconnue, et remplacée par une statue de bois, tenant son Enfant assis sur les genoux, laquelle fut brûlée en 1793. ».
Les normands de Sicile vénéraient-ils Isis-Cybèle ?
« Nigra sum, sed formosa » : « Je suis noire mais belle. » – Cantique des cantiques (1 :5)
Son sanctuaire à Tindari en Sicile a été bâti sur un temple de Cybèle.
La crypte souterraine, utérus d’Isis
D’après Fulcanelli, « Jadis, les chambres souterraines des temples servaient de demeure aux statues d’Isis, lesquelles devinrent, lors de l’introduction du christianisme en Gaule, ces Vierges noires que le peuple, de nos jours, entoure d’une vénération toute particulière. Leur symbolisme est d’ailleurs identique ; les une et les autres montrent, sur leur soubassement, la fameuse inscription : Virgini parituræ ; à la Vierge qui doit enfanter.
La mère des dieux
Ch. Bigarne, nous parle de plusieurs statues d’Isis désignées sous le même vocable. « Déjà, (…) le savant Elias Schadius avait signalé, dans son livre De dictis Germanicis, une inscription analogue : Isidi, seu Virgini ex qua filius proditurus est (A Isis, ou à la Vierge de qui le Fils prendra naissance). Ces icônes n’auraient donc point le sens chrétien qu’on leur prête, du moins exotériquement. Isis, avant la conception, c’est, dit Bigarne, dans la théogonie astronomique, l’attribut de la Vierge que plusieurs monuments, bien antérieurs au christianisme, désignent sous le nom de Virgo paritura, c’est-à-dire la terre avant sa fécondation, et que les rayons du soleil vont bientôt animer. C’est aussi la mère des dieux, comme l’atteste une pierre de Die : Matri Deum Magnæ ideæ. » (…) Un détail encore, utile pour l’hermétiste. Dans le cérémonial prescrit pour les processions de Vierges noires, on ne brûlait que des cierges de couleur verte.
« Au nom de la mère, de son fils, et du Saint Esprit »
Qui est l’oncle maternel, car père spirituel et non biologique de son neveu. La mère est « vierge » car non mariée, c’est à dire sans père légitime reconnu par le mariage.
On sait que les tribus gauloises adoraient Belen, dont la sœur, qui serait également « l’épouse », était Belisama, la Vierge noire. Il est probable que la Vierge noire adorée à Chartres, des siècles avant la cathédrale chrétienne, était une représentation de Belisama. La déesse Bélisama (pareil à la flamme), dans le panthéon Celte, était la sœur de Belen, le grand dieu des Gaules et la personnification du Soleil. Lug serait son fils. Elle qui restant vierge (sans père reconnu, car non mariée) aurait été fécondée par l’Esprit Divin du dieu Belen, son frère avec qui elle régnait (typique des royautés matrilinéaires). La trinité Belisama – Belenos – Lug est identique à la trinité d’Isis – Osiris – Horus, une trinité matriarcale : Isis est vierge, et son frère Osiris n’est pas le père supposé de son fils Horus, mais seulement son oncle maternel, son père spirituel et non biologique.
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Isis, la vierge noire de Paris
Les Parisii étaient un peuple belge vivant dans l’actuelle région parisienne et en Grande-Bretagne. Selon César (53 av. J.-C.), leur ville principale (oppidum) aurait été Lutetia (Paris). L’origine et la signification de l’ethnonyme Parisii n’est pas établie avec certitude, car le celtique ancien est assez mal connu au début du xxie siècle.
L’idole de Saint-Germain-des-Prés
Jacques-Antoine Dulaure, un historien du xviiie ‑ xixe siècle, associait le nom des Parisii à la déesse égyptienne Isis, à cause de la découverte d’une statue de la déesse retrouvée à l’église Saint-Germain-des-Prés. Cette statue était maigre, haute, droite, noire pour sa peau, presque nue avec quelque linge entassé autour de ses membres et était située contre la muraille du côté septentrional où est situé le crucifix de l’église : on l’appelait l’idole de Saint-Germain-des-Prés. Avant la fondation de l’abbaye, il existait déjà à l’époque romaine, un temple probablement dédié à Isis, alors appelé Locotice, qui assurait l’immortalité aux initiés.
Les vierges noires de Metz et Lyon
Witkowski en signale une que logeait la Cathédrale Saint-Étienne de Metz. « Cette figure en pierre d’Isis, écrit l’auteur, mesurant 0 m. 43 de haut sur 0 m. 29 de large, provenait du vieux cloître. La saillie de ce haut relief était de 0 m. 18 ; il représentait un buste nu de femme, mais si maigre que, pour nous servir d’une expression imagée de l’abbé Brantôme, « elle ne pouvoit rien monstrer que le bastiment » ; sa tête était couverte d’un voile. Deux mamelles sèches pendaient à sa poitrine comme celles des Dianes d’Ephèse. La peau était colorée en rouge, et la draperie qui contournait la taille en noir… Une statue analogue existait à Saint-Germain-des-Prés et à Saint-Etienne de Lyon.»
Le secret des caves de l’Observatoire
Camille Flammarion parle d’une statue analogue qu’il vit dans les caves de l’Observatoire, le 24 septembre 1871, deux siècles après la première observation thermométrique qui y fut faite en 1671.
« Le colossal édifice de Louis XIV, écrit-il, qui élève la balustrade de sa terrasse à vingt-huit mètres au-dessus du sol, descend au-dessous en des fondations qui ont la même profondeur : vingt-huit mètres. A l’angle de l’une des galeries souterraines, on remarque une statuette de la Vierge, placée là cette même année 1671, et que des vers gravés à ses pieds invoquent sous le nom de Nostre-Dame de dessous terre. »
Isis brûlée lors de la Révolution Française
La cathédrale Notre-Dame-de-l’Annonciation du Puy-en-Velay (Auvergne) est un monument majeur de l’art roman et de l’Occident chrétien (XIe siècle). Une Vierge noire, objet de nombreux pèlerinages au cours des siècles, trône sur un maître-autel baroque. L’actuelle effigie remplace celle qui aurait été offerte par Saint Louis à son retour de la croisade d’Égypte, et qui fut brûlée lors de la Révolution française. Selon Faujas de Saint-Fond, il s’agissait d’une statue très ancienne d’Isis, déesse égyptienne de la fécondité, que l’on avait métamorphosée en Vierge. Il est vrai que des statuettes d’Isis tenant Osiris sur les genoux lui ressemblent de façon frappante. En janvier 1794, la Vierge Noire arrachée de son autel fut dépouillée de ses richesses (pierres précieuses, dorures…) et reléguée aux Archives. On se souvint malheureusement d’elle : le 8 juin 1794, jour de la Pentecôte, les représentants du pouvoir révolutionnaire, dont Louis Guyardin, vinrent la chercher pour la brûler place du Martouret. Quand les toiles enduites de couleur eurent fini de se consumer, une petite porte secrète pratiquée dans le dos de la statue s’ouvrit et une sorte de parchemin roulé en boule en sortit ; malgré les protestations, on ne chercha pas à savoir ce qu’il contenait. Certains pensent que sur ce parchemin était inscrite l’origine exacte de la vierge noire.
Isis n’a pas été fécondée par son frère Osiris
On a brûlé à la révolution la vierge noire du Puy. Mais avant de mourir, la statue de cèdre noir aux yeux de verre a parlé ; un témoin raconte : « Un papyrus est sorti d’une cavité de bois et une pierre ovale portant des inscriptions égyptiennes a été retrouvée dans les cendres. Mais personne n’a voulu s’intéresser à ces choses, ni les historiens, ni les artistes, ni les philosophes, ni les hommes politiques. La vierge noire du Puy avait l’aspect d’une momie ; les bandelettes qui enveloppaient son corps ainsi que celui de son fils ne laissaient voir que leur visage. Isis, épouse d’Osiris, fécondée par Râ, le dieu soleil du ciel, portait Horus sur ses genoux. » (Jean Peyrard, histoire secrète de l’Auvergne, p.279).
Un culte matriarcal résistant
Avec les Madones noires, nous sommes donc en présence de cultes qui dépassent les dogmes chrétiens sur la virginité de la « Mère de Dieu ». Presque tous les aspects de ce culte laissent transpirer un paganisme originel, resté incroyablement vivace après des siècles de christianisation et de chasse aux superstitions.
Lourdes, une expérience païenne matriarcale ?
En 1858 eurent lieu à Lourdes dans les Pyrénées françaises plusieurs apparitions miraculeuses. C’est une certaine Bernadette Soubirous qui fut témoin de ces apparitions qu’elle interpréta comme étant celles de la vierge Marie. Bernadette raconta alors qu’elle vit la vierge car c’est le seul langage religieux qu’elle connaissait. Selon plusieurs spécialistes de la question, il serait fort possible que Bernadette ne sut pas interpréter correctement ce qu’elle vit. Plusieurs indices tendent à démontrer que l’expérience qu’elle vécut, fut une montée de la Déesse-Mère de son inconscient dans son conscient. Ce serait donc une expérience païenne qu’elle n’aurait pas su identifier.
Grotte et source, des symboles de la déesse-mère
Le fait que les apparitions eurent lieu dans une grotte près d’une source est très révélateur au niveau symbolique, car ces deux éléments sont intimement liés au culte de la Terre-Mère. La source est l’élément vital de fécondité qui connecte avec la Déesse-Mère dans son aspect jeune, tandis que la grotte est un symbole de la matrice universelle, la Déesse dans son aspect plus mûr, celui de la Mère. Ce sont des détails qui ont une grande importance car ils sont attestés dans tous les cultes antiques liés à la grande Déesse. L’incertitude de Bernadette est attestée, car elle n’a pas pu donner d’explications pour ses visions, jusqu’à ce qu’elle lui dise « je suis l’immaculée conception ». Elle n’a donc pas identifié au premier abord l’apparition… ceci jusqu’à ce que les autorités catholiques du secteur lui soufflent à l’oreille ce qu’elle devait dire afin de ne pas être prise pour une sorcière, ce qui lui aurait valu certains problèmes avec la légendaire tolérance inquisitoire des catholiques… Par ailleurs, le genre de pélerinages qui a lieu régulièrement à Lourdes possède un fond plutôt païen, car si on enlève le vernis chrétien, on est bien en présence d’anciennes coutumes antérieures au christianisme telles qu’on les connaît de la Grèce païenne par exemple.
« En terre païenne, aux Indes par exemple, elle aurait interprété son aventure de manière plus charnelle, plus sexuelle, et n’aurait pas cru devoir se retirer de la vie. Pour nous aucun doute possible: il y a eu à Lourdes un événement religieux authentique et nous contestons seulement sa spécificité chrétienne. » – « L’âme européenne », Robert Dun